Interview avec Paulette Lenert dans L'essentiel

"La popularité, c'est dû à la crise"

Interview: L'essentiel (Nicolas Martin)

L'essentiel: Auriez-vous pu imaginer une telle première année au ministère?

Paulette Lenert: Clairement non. Et je n'ose même pas imaginer les mois qui viennent car cela ne devient pas moins stressant. Variant, vaccins... Chaque semaine, il y a quelque chose.

L'essentiel: Aviez-vous hésité à accepter?

Paulette Lenert: Pas vraiment. C'était un grand défi, mais j'ai dit oui avec beaucoup de plaisir.

L'essentiel: Avez-vous déjà regretté ou voulu renoncer?

Paulette Lenert: Ce n'est pas mon caractère. Mais j'ai eu des moments où je me suis dit, "ça ne va pas aller". Comme tout le monde. Cette situation pousse à bout. On dit "ce sera mieux dans six mois", mais six mois c'est long à ce rythme.

L'essentiel: Quels ont été les moments forts de cette année?

Paulette Lenert: La solidarité sur le terrain et dans nos équipes. Cela a marqué cette crise et ne s'est pas perdu.

L'essentiel: Et les plus douloureux?

Paulette Lenert: Quand on se sent impuissant en pleine poussée exponentielle comme en octobre. On ne sait pas jusqu'où ça va aller. Plus de nouveaux infectés, c'est plus de décès. C'est tragique.

L'essentiel: Y a-t-il eu des erreurs?

Paulette Lenert: Au moment de la décision, il y a des choses qu'on ne sait pas encore. Avec le recul, on aurait peut-être fait des choses différemment. Je ne vois pas d'erreur flagrante, mais on n'a pas encore assez de recul.

L'essentiel: Vous êtes très populaire. Que vous disent les gens?

Paulette Lenert: Ils m'écrivent beaucoup, je n'arrive plus à répondre. Ça fait chaud au cœur. Mais la popularité c'est biaisé, c'est vraiment dû à la crise. Je suis peu dehors, donc on me croise moins. Je travaille et je rentre à la maison.

L'essentiel: Êtes-vous surprise par la défiance à l'égard des politiques ou de la science?

Paulette Lenert: C'est inhérent aux situations de crise. Les politiques sont exposés. Et on regarde la science comme une réponse à tout alors qu'elle est la première à dire "on n'a pas encore de certitudes". Il y a des attentes démesurées et cela crée des tensions.

L'essentiel: Comme socialiste, y a-t-il eu des désaccords avec le Premier ministre DP?

Paulette Lenert: Non, Xavier Bettel a un sens social très prononcé. C'est quasiment apolitique. On a une crise à gérer et à assumer la responsabilité de nos décisions. On cherche le meilleur résultat pour notre pays. Jamais je n'ai annoncé une mesure à contrecœur. Par contre, il fut difficile vis-à-vis de l'opinion de plaider l'été dernier pour des mesures de précaution. Nous savions que ça reprendrait.

L'essentiel: Vos projets après la crise?

Paulette Lenert: En tirer les leçons. Elle a mis en évidence beaucoup de fragilités, comme la grande dépendance au personnel frontalier, notamment dans la santé. Et puis j'ai hâte de retrouver mes autres dossiers pour en boucler un maximum. On a vu l'importance du système de santé. J'ai hâte de commencer mon "vrai" travail.

L'essentiel: Où en sera-t-on dans un an?

Paulette Lenert: J'imagine qu'on regardera les photos avec les masques, qu'on trouvera ça très drôle et qu'on pourra les ranger pour de bon. J'espère qu'on sera tous aussi soudés que pendant la crise.

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