Discours de Lydia Mutsch à l'occasion de la conférence annuelle de Deloitte: "Integrated care ou la gestion intégrée des soins au service du patient"

"Le défi qu’il revient de relever est de mettre en place un cadre qui permet d’apporter le bon traitement au bon patient, au bon moment."

Seul le discours prononcé fait foi

"Monsieur le Président de la Fédération des Hôpitaux, M. Paul Junck,

Cher Monsieur Brucher, organisateur de cette Conférence annuelle,

Chers conférenciers et invités,

Mesdames et Messieurs,

J’ai l’honneur en tant que ministre de la Santé de vous souhaiter à toutes et à tous la bienvenue. C’est un grand plaisir d’ouvrir cette conférence consacrée à la gestion intégrée des soins au service du patient.

Placer le patient et l’innovation au centre de nos préoccupations, tel doit être l’objectif premier dans tous nos efforts visant à améliorer la santé des citoyens européens - en accord avec la Stratégie Europe 2020 - tout en maintenant la viabilité des systèmes de santé. Tel a également été le Leitmotiv de la Présidence luxembourgeoise en matière de santé publique.

Il m’a semblé évident de faire de la médecine personnalisée l’une des priorités de la Présidence luxembourgeoise. Et je me félicite tout particulièrement que pour la première fois, une Présidence ait réussi à faire avancer les discussions sur les pistes de solutions à proposer et à poser les jalons pour une stratégie européenne en matière de médecine personnalisée.

La médecine personnalisée va changer les programmes de prévention contre l’obésité ou le cancer et d’autres maladies chroniques rares ou complexes. Elle se concentre sur le patient et l’innovation et comporte un grand potentiel pour l’amélioration de la santé de beaucoup de patients et assure des meilleurs résultats au niveau de l’efficacité et de la transparence de nos systèmes de santé.

Le défi qu’il revient de relever est de mettre en place un cadre qui permet d’apporter le bon traitement au bon patient, au bon moment.

Néanmoins, l’intégration de la médecine personnalisée dans les pratiques cliniques et les soins au quotidien s’avère encore difficile compte tenu des nombreux obstacles et défis qui s’opposent encore à un accès, en temps opportun, à des traitements ciblés.

La coopération entre les États membres est donc essentielle pour faire de l’accès à la médecine personnalisée une réalité pour tous les patients en Europe. Ainsi, une approche à long terme centrée sur le patient est visée afin d’innover et d’assurer la transposition des nouvelles thérapies des laboratoires aux patients.

Autrement dit : le but est de faire évoluer la médecine personnalisée d’une approche "sur mesure" vers un concept accessible au plus grand nombre, par le biais d’une coopération renforcée au niveau européen dans plusieurs domaines.

Améliorer le parcours de soins du patient, tel est également le défi relevé par la gestion intégrée des soins.

Des modèles intégrés de prévention et de gestion ("Integrated care") peuvent être suggérés notamment pour faire face à la nature multifactorielle des maladies chroniques, rares ou complexes.

Néanmoins,  leur implantation à l’échelle des systèmes de santé demeure un défi.

Tout d’abord il s’agit de renforcer la mise en réseau des différentes disciplines médicales, c’est-à-dire des médecins-généralistes, spécialistes et hôpitaux. En outre, une étroite collaboration entre les services hospitaliers, extrahospitaliers et ambulatoires à tous les niveaux constitue pour ainsi dire la conditio sine qua non de l’implémentation d’une gestion intégrée des soins.

Un outil facilitateur dans ce contexte représente sans aucun doute le  Dossier de soins partagé, le DSP, lancé en phase de préfiguration en juin 2015 au Grand-Duché. En effet, le dossier électronique de santé sécurisé du patient sert d’outil collaboratif entre professionnels de santé intervenant auprès du patient.

D’ailleurs - afin de vous démontrer la panoplie de tous les acteurs impliqués - le Conseil de Gérance de l’Agence eSanté regroupe en son sein des représentants de l’AMMD, de la FHL, de la FLLAM, de la COPAS, du Syndicat des pharmaciens luxembourgeois, de la Patiente Vertriedung, ainsi que de la CNS, du Centre Commun de la Sécurité sociale et des ministères de la Santé et de la Sécurité sociale.

Dans un environnement où la prise en charge des soins de santé devient de plus en plus complexe et multidisciplinaire, le DSP apparait comme un atout majeur pour les échanges et le partage d’informations. D’une part entre les professionnels de santé et d’autre part entre les professionnels de santé et le patient qui devient acteur de sa prise en charge.

Le service DSP repose sur une confiance préexistante entre professionnels de santé et patients. Celle-ci sera renforcée par une meilleure coordination des soins au travers du DSP, ceci dans le respect du colloque singulier ou collégial entre les professionnels de santé et les patients.

Quand on parle de partage d’informations, il se pose bien entendu la question de la confidentialité des données médicales ainsi que de la sécurité informatique, qui restent des préoccupations majeures pour les patients.

Ces points cruciaux ont d’ailleurs été largement pris en compte dans la mise en place du DSP. Le ministère de la Santé a ainsi impliqué la Commission Nationale de Protection des Données pour l’évaluation de chaque étape de la réalisation d’un tel dossier de soins partagé.

Permettez-moi d’ajouter que le DSP a connu un large succès lors de son lancement auprès du public-cible.

La modernisation des systèmes d’information du domaine de la santé et de la sécurité sociale reste d’ailleurs une priorité du gouvernement luxembourgeois.

En résumé, l'interopérabilité des dossiers médicaux électroniques, ainsi que l’élaboration de principes communs pour la collecte et le partage de données, constituent une base indispensable pour la mise en place d’une gestion intégrée des soins, et par là, pour l’amélioration du parcours du patient.

Il convient d’ajouter également, l'échange d'informations et de bonnes pratiques dans les enceintes existantes, tout comme l’élaboration de stratégies à long terme.

Bref, si plusieurs outils sont dès lors en train de se mettre en place, les défis de demain sont toujours conséquents, mais pas insurmontables.

Bien au contraire.

Avant de conclure, je voudrais pour cela présenter un exemple concret, qui, selon moi, illustre parfaitement la réussite d’une gestion intégrée: Le plan national cancer. La première phase d’implémentation a été entamée en 2014, mobilisant l’ensemble des acteurs: ministère de la Santé, Direction de la Santé, Établissements hospitaliers, médecins, soignants, fondations, associations de patients - chacun contribuant selon sa compétence, en partenariat avec tous.

Pour suivre la mise en œuvre du PNC et proposer la stratégie de lutte contre le cancer, une Plateforme Nationale Cancer a été instituée, composée de 20 membres.

11 groupes de travail ont été mis en place, 116 acteurs y participent depuis le lancement.

Le PNC constitue ainsi un outil permettant de structurer sur le plan national la lutte contre le cancer. Il permet de fédérer l’ensemble des acteurs impliqués autour de grands objectifs à atteindre sur une période de 5 années (2014-2018).

En premier lieu, il s’agit donc d’améliorer la gouvernance de la cancérologie.

Le cancer est un défi de santé publique en raison de son incidence et de sa prévalence croissantes, des coûts y associés pour le traiter, et de la mortalité.

Lutter contre le cancer nécessite de mettre en place des politiques concertées à tous les niveaux afin d’augmenter l’efficacité et la performance des mesures. Cela nécessite la mise en place d’une gouvernance structurée avec un pilotage basé sur des indicateurs valides issus d’un système d’information performant.

Un véritable partenariat avec l’ensemble des acteurs publics et privés est la clé d’une gouvernance efficiente. 

Ensuite,  le PNC  cherche à optimiser les moyens déjà mis en place au niveau national afin de pouvoir soigner avec la même qualité, dans l’avenir, toutes les personnes atteintes du cancer.

Il standardise le parcours de soins afin de le rendre conforme aux pratiques internationales ; veille à garantir une équité de chance à tous les patients et  recherche aussi à augmenter la performance des services prestés en cancérologie.

Il entraîne également une obligation de restructuration des services et filières de prise en charge en cancérologie sur le territoire et doit permettre de réaliser des économies d’échelle, pouvant être réinvesties autrement dans la lutte contre le cancer.

Globalement, le Plan-Cancer 2014-2018 a pour ambition de mieux planifier, mieux coordonner, mieux gérer les offres de services au sein du système de santé luxembourgeois, afin de garantir une accessibilité pour tous au diagnostic et au traitement selon les standards internationaux.

Voilà juste un concept parmi d’autres, comme notamment le plan national démence ou encore le plan de prévention du suicide.

Soyez rassuré: je vais en rester là, et passer la parole aux experts en la matière.

Je vous souhaite donc des échanges et discussions très fructueuses sur les nombreux défis pour l’avenir et enjeux en matière de gestion intégrée des soins au service du patient.

Merci."

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