Discours de Lydia Mutsch à l'occasion de la rencontre des coordinateurs nationaux "drogues" de l’UE

"(...)Il faut une concertation entre les acteurs et un réajustement des concepts(...)"

©MSAN
Dr Alain Origer, Lydia Mutsch, Camille Weis

"Mesdames, Messieurs,

Bienvenus au Luxembourg et bienvenus à cette réunion des coordinateurs nationaux "drogues".

J’ai le plaisir d’ouvrir aujourd’hui ce forum que je qualifierais d’extraordinaire et de précieux étant donné que c’est l’unique occasion où l’ensemble des coordinateurs drogues de l’Union européenne ont la possibilité d‘échanger de façon bilatérale, multilatérale et en plénière sur des sujets d’actualités aux niveaux national et international et en rapport avec la stratégie et les plans d’action antidrogue de l’Union européenne.

La Présidence luxembourgeoise a choisi de mettre cette réunion sous le thème de la prévention: comme concept global qui connait des objectifs convergents. De façon plus incisive, notre thème pourrait également s’appeler "La prévention dans tous ses états".

L’Union européenne est connue pour ses efforts de mettre en œuvre une politique de réponse aux problèmes posés par l’usage et l’abus de drogues qui s’oriente sur les données scientifiques et sur une approche équilibrée.

Équilibrée au sens d’un "dosage" raisonné de mesures de réduction de la demande, de réduction de l’offre et de toute autre mesure qui a prouvé une efficacité au bénéfice des différentes populations cibles. 

Elle se veut "équilibrée", et j’ajouterai qu’elle devrait, dans le meilleurs des cas, aussi être "concertée". Je crois en effet que l’ensemble de nos réponses ou des actions que nous projetons de mettre en place ne peuvent développer leur plein potentiel si elles s’inscrivent dans une approche globale dans laquelle ces mêmes actions sont complémentaires et l’ensemble de notre réponse plus que la somme de mesures bien pensées, mais isolées.

Je pense également à des projets plus sensibles comme les salles de consommation médicalement supervisées de drogues ou des projets de testing de produits psychoactifs dans les milieux festifs. Ces actions sont uniquement possibles, et par ailleurs efficientes, si au préalable, et au-delà de la mise en place d’un cadre réglementaire adéquat, il y a consensus entre les autorités sanitaires, répressives, voire les parquets tout comme entre les autorités nationales et locales.

J’ajouterais que tout au long de l’application de ces mesures, il faut une concertation entre les acteurs et un réajustement des concepts et modalités de coopération si besoin il y a.

Je trouve le thème de votre réunion d’aujourd’hui particulièrement pertinent puisque nous ne sommes pas sans savoir que l’usage de drogues et ses corollaires en termes de santé publique et de sécurité publique ne se conforment pour la plupart pas à nos stratégies d’action mais que ce sont nos actions qui doivent continuellement être remises en question, réajustées et complémentées au fil des nouvelles substances qui apparaissent sur le marché des produits psychoactifs et des comportements de consommation dans une société, qui est pareillement changeante et dynamique.

Lorsque nous essayons de réduire la consommation de drogues dans la population générale ou les conséquences négatives de l’abus de produits psychoactifs dans différents groupes cibles, nous poursuivons en réalité toujours un seul et même but à savoir: prévenir les dommages liées à l'usage de drogues et à ses corrolaires.  La seule variable dans cette équation préventive est le moment auquel nous pouvons ou devons intervenir.

Ce constat est par ailleurs reflété dans la stratégie et le plan d’action antidrogue actuels de l’Union européenne qui:

d’une part conçoit le concept de réduction de la demande de drogue comme étant une série de mesures d'égale importance et à effets complémentaires,

et d’autre part vise à améliorer la disponibilité et l'efficacité des mesures de prévention qui tiennent compte:

  • des facteurs de risque liés à des caractéristiques sociodémographiques et culturels (e.g. âge, sexe...),
  • des facteurs de risque liés à la situation des personnes, (e.g. sans abri, prostitution, en détention…)
  • et des facteurs de risque individuels (e.g. troubles psychiques divers...)

Il est probablement illusoire de croire que nous pouvons empêcher que certains de nos jeunes et moins jeunes, expérimentent avec des produits psychoactifs, en usent ou en abusent.

Ce que nous pouvons faire toutefois est d’agir, dans la mesure du possible, à tous les niveaux et moments dans cette relation dynamique qui lie l’être humain à des produits qui altèrent son état de conscience, leur instrumentalisation au service du bonheur et les comportements addictifs qui peuvent en découler.

Les actions, projets, offres et programmes que vous allez aborder et visiter aujourd’hui et demain occupent ainsi des positions différentes dans le spectre des interventions préventives, mais ils ont en commun de placer la prévention de dommages potentiels associés à l’usage de drogues, l’individu et sa santé au centre de nos préoccupations. 

Le titre, la prévention dans tous ses états est dès lors un plaidoyer pour la diversification de nos efforts face au phénomène de l’usage de drogues qui pose continuellement de nouveaux défis mais c’est également une invitation à l’échange entre les états qui ont tous leurs spécificités et dès lors énormément des choses à partager dans les domaines des drogues et des addictions.

En ce sens, Mesdames, Messieurs, chers coordinateurs nationaux, je vous souhaite des échanges fructueux au cours de ces deux journées et un séjour agréable au Grand-Duché du Luxembourg."

 

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