Interview avec Paulette Lenert dans FHL Info

"Cette crise a démontré la solidité et la solidarité de nos hôpitaux!"

Interview: FHL Info

FHL Info: Aujourd'hui, six mois après la montée en puissance de la première vague de la pandémie, de quels aspects de cette crise êtes-vous le plus fière? Qu'est-ce qui vous a marqué le plus positivement?

Paulette Lenert: La solidarité! Et la façon spontanée et naturelle avec laquelle elle s'est mise en place, à tous les niveaux. Dans les hôpitaux, notamment, le personnel s'est montré motivé et soucieux de maitriser la situation au plus vite. En tant que ministre de la Santé et en tant qu'individu, c'était rassurant!

Cette crise a, selon moi, démontré la solidité de notre système de soins de santé. Nous avons eu raison d'y investir, ces dernières années. Après tout, c'est un secteur vital; il ne faut pas y faire d'économies. Et travailler dans de bonnes conditions a sans doute un impact sur l'état d'esprit du personnel.

FHL Info: En cas de deuxième, voire de troisième vague, à quoi serez-vous particulièrement attentive? 

Paulette Lenert: Notre priorité sera de maintenir une activité médicale la plus normale possible. Chaque hôpital dispose d'un plan, basé sur des seuils de lits occupés par la COVID-19. Le but: éviter de déprogrammer "inutilement" d'autres soins de santé, comme nous étions contraints de le faire en mars. Nous n'aurions pas pu faire autrement. Pour rappel, à l'époque nous ne savions presque rien de cette nouvelle maladie ni de la façon dont la pandémie allait évoluer. Si nous avons toujours cherché à assurer le suivi des autres maladies graves et chroniques, de nombreux autres soins ont dû être postposés. Nous souhaitons maintenant rattraper ces retards et, bien sûr, éviter d'en accumuler de nouveaux. "

FHL Info: La politique de suivi de l'épidémie a évolué au cours du temps. En ce début d'année scolaire, où en sommes-nous?

Paulette Lenert: En effet, cette politique a varié et variera encore au gré des circonstances. Au début, nous pensions tester tout le monde, mais nous avons vite compris qu'il était préférable de nous adapter à la réalité du terrain. Aujourd'hui, notre approche est plus ciblée, plus localisée. Dès que nous constatons une recrudescence dans une zone géographique ou dans un secteur professionnel, nous multiplions les tests de dépistage dans cette région ou ce secteur. Le personnel de santé est, quant à lui, testé régulièrement.

Nous suivons de près les indicateurs et adaptons nos plans en fonction. Par exemple, dans les prochains mois, l'épidémie annuelle de grippe – dont les symptômes ressemblent fort à ceux de la COVID-19 – sera un défi pour le système des soins de santé. Nous avons donc commandé davantage de doses de vaccins et nous insisterons auprès des groupes-cibles pour qu'ils se fassent vacciner contre la grippe. 

FHL Info: Revenons un peu en arrière. Quand et comment s'est organisée la collaboration entre votre ministère et les hôpitaux luxembourgeois?

Paulette Lenert: Nos contacts avec les hôpitaux et les médecins se sont intensifiés dès le mois de février. Il était alors certain que la pandémie allait atteindre le Luxembourg. Notre objectif était alors d'éviter la situation italienne.

J'ai nommé le Dr Philippe Turk comme agent de liaison entre les différents acteurs. La collaboration s'est très vite instaurée et a été excellente! Nous étions en contact tous les jours avec les directeurs des quatre hôpitaux et avec la FHL. Ils ont accepté sans problème de nous fournir des rapports quotidiens reprenant les indicateurs de suivi (état des stocks, occupation des lits, etc.). Nous formions une seule et grande équipe, fort soudée. J'espère que cette collégialité et cette solidarité se poursuivront dans le futur, au-delà de cette pandémie, car c'est un plus pour l'organisation générale des soins de santé. 

FHL Info: À l'instar de nombreux pays, le Grand-Duché du Luxembourg a été confronté à un manque d'équipements de protection et de respirateurs. Comment avez-vous résolu ce problème?

Paulette Lenert: Il n'y a pas eu de pénurie à proprement parler, mais il est vrai que nous avons été à flux très tendu pendant quelques semaines. Raison pour laquelle une cellule logistique a rapidement été créée. Une cinquantaine de personnes, issues de secteurs publics et privés, se sont mobilisées pour trouver des solutions. Les membres du personnel du transporteur Cargolux, par exemple, ont été d'une aide précieuse. Grâce à leurs nombreux contacts en Asie et leurs connaissances des arcanes administratives locales, nous avons pu acquérir le matériel dont nous avions besoin. Ils ont également veillé à ce que les commandes soient bien acheminées jusque dans les ports. Une fois arrivé au Luxembourg, le matériel était stocké et distribué sous la coordination de mon ministère.

Aujourd'hui, nous disposons d'un stock de matériel confortable. À ce niveau-là, nous sommes parés pour affronter une éventuelle deuxième vague. 

FHL Info: Le Luxembourg compte un grand nombre de travailleurs transfrontaliers belges, français et allemands. Comment se passe la collaboration avec les gouvernements des pays limitrophes?

Paulette Lenert: Bien. Quand un ressortissant étranger est déclaré positif au SARS-CoV-2 chez nous, nous le signalons aux autorités compétentes de son pays. Et vice-versa: nous sommes prévenus quand un citoyen luxembourgeois est testé positif.

Grâce à la collaboration et la bonne volonté de tous les acteurs, nous avons aussi été en mesure de nous montrer solidaires envers nos voisins européens. Par exemple, nous avons pu répondre à l'appel à l'aide des hôpitaux de l'est de la France et accueillir et soigner onze ressortissants français atteints de formes sévères de la COVID-19. Nous avons également fait profiter d'autres pays de notre canal d'acheminent de matériel depuis l'Asie. C'est d'ailleurs l'une des principales leçons que je retire de cette crise: elle a révélé le meilleur chez beaucoup de personnes. Nous pouvons nous en féliciter! 

Dernière mise à jour